Ce qu’il faut retenir, c’est que la destination première d’un mur de soutènement est de terrasser des fonds situés en escalier et donc, d'empêcher que le fonds du dessus ne se répande sur le fonds du dessous.
Un mur est de soutènement dès lors que sa destination consiste à maintenir les terres de l'un des fonds ; il s'ensuit que la présomption de mitoyenneté posée par l'article 653 du code civil ne peut recevoir application, quand en aucun point de son étendue, il ne présente les caractéristiques d'un mur de clôture.
La fonction de soutènement opère comme une marque de non-mitoyenneté.
En effet, un mur qualifié de soutènement bénéficie au fonds du dessus dont l'éboulement serait source d'une obligation de réparation, il est ainsi a priori à l'usage exclusif du fonds supérieur, sans pouvoir être présumé mitoyen.
Pour un exemple : Cour de cassation, Civ. 3e, 12 oct. 2022, no 21-21.841 :
« 8. La cour d'appel a énoncé, à bon droit, qu'un mur de soutènement est présumé appartenir exclusivement à celui dont les terres sont maintenues par l'ouvrage.
9. Elle a constaté que le terrain acquis par M. et Mme [T] présentait la particularité d'être fortement surélevé par rapport à la parcelle située en dessous appartenant à Mme [Y], qu'il surplombait d'environ trois mètres, un haut mur de soutènement séparant les deux parcelles.
10. Elle a également relevé que l'acte de vente contenait en annexe un plan partiel du lotissement où le mur de soutènement, représenté par un double trait hachuré, limitait la parcelle des acquéreurs et que le plan du lot numéro 6 reproduisait de manière précise ses contours irréguliers tels qu'il figuraient sur le plan du lotissement.
11. Elle a pu en déduire, d'une part, que la présomption de propriété n'était pas combattue par un titre contraire, d'autre part, que la nature même des lieux, que les acquéreurs avaient eu tout loisir d'examiner avant la vente, ne permettait pas de prouver une volonté contraire des parties, excluant ainsi toute croyance légitime des acquéreurs en ce sens.
12. Elle a, en conséquence, exactement retenu que M. et Mme [T] avaient acquis le mur de soutènement en même temps que la parcelle soutenue. »
Il appartient donc à son propriétaire d'en assumer la charge en cas de dommage causé au fonds inférieur ; toutefois, il peut être partiellement mitoyen si une partie est à l'usage commun de clôture entre les deux propriétés, ou s'il sert à une construction située en contrebas.
En tout état de cause, la Cour de cassation a pu juger qu’un tel mur ne devait pas empiéter sur le terrain du voisin.
Dans la pratique, et ce qu’il faut retenir, c’est que la requalification du mur de soutènement en mur mitoyen dépendra de ses mesures : l'analyse est pragmatique, et l'appréciation des juges du fond est souveraine.
Partant, et dans cette hypothèse, il faut retenir que la qualification de mitoyenneté pour un mur de soutènement entraîne l'obligation pour les copropriétaires de participer à frais communs à sa réfection.
Tant soit est-il qu’une étude de la jurisprudence démontre que, et par principe, un mur de soutènement n'est pas un mur de clôture et, par conséquent, ne peut être considéré comme un mur mitoyen.
La jurisprudence est constante en la matière.
Néanmoins, comme précisé ci-avant, il a pu être jugé qu’un mur de soutènement peut être partiellement mitoyen, pour la portion à l'usage commun des deux voisins, et pour le surplus de sa longueur, présumé appartenir au propriétaire dont il soutient les terres par exemple, si une partie est à l'usage commun de clôture entre les deux propriétés, ou s'il sert à une construction située en contrebas.
En ce sens, la Cour de cassation (Civ. 3e, 4 janv. 1995, no 92-19.818) a pu juger que :
« Attendu que M. Y..., propriétaire de deux parcelles de terre surplombant la parcelle voisine appartenant à M. X..., fait grief à l'arrêt attaqué (Limoges, 1er juillet 1992) de dire que le mur de soutènement édifié entre les propriétés respectives lui appartient, sauf en sa partie où M. X... a adossé un bâtiment à usage de poulailler et de le condamner à assurer l'entretien de la partie du mur dont il est propriétaire et, à frais communs avec M. X..., pour la partie du mur qui est mitoyenne, alors, selon le moyen, 1° que la cour d'appel ne pouvait décider que le mur de soutènement en cause était présumé appartenir à M. Y..., au seul motif que le terrain de celui-ci surplombait le terrain de M. X..., sans rechercher de surplus si, en l'état de la situation des lieux, il avait été du seul intérêt de M. X... ou de ses auteurs de le construire et de l'entretenir ; 2° que M. Y... avait soutenu, dans des conclusions de ce chef délaissées, tout à la fois que M. X... ou ses auteurs avaient fait procéder à une excavation dans la pente naturelle des terrains dans laquelle ils avaient fait édifier le mur litigieux, et que celui-ci se trouvait sur le terrain de M. X..., et que la cour d'appel aurait dû répondre à ces moyens de défense d'où il résultait qu'était détruite la présomption d'appartenance du mur à M. Y... et qu'était prouvée la propriété du mur à M. X... ; 3° que, dès l'instant où la cour d'appel constatait qu'une partie du mur était mitoyenne et où il n'était pas soutenu que les différentes parties du mur aient eu une origine et une qualité juridique différentes, la cour d'appel ne pouvait, sans omettre de tirer de ses propres constatations les conséquences nécessaires qu'elles comportaient, refuser de considérer qu'à tout le moins et dans sa totalité le mur de soutènement était mitoyen ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les parcelles appartenant à M. Y... étant en surplomb par rapport à la propriété de M. X..., et justement relevé que le mur de soutènement était présumé appartenir à M. Y... dont il soutenait les terres et qui en profitait, la cour d'appel a, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision en retenant que le mur, à l'endroit du poulailler, étant à l'usage des deux parties, leur était mitoyen sur tout l'emplacement du poulailler et que, pour le surplus de la longueur du mur, on ne pouvait, en l'état de l'ensemble des attestations, considérer que la preuve était faite par M. Y... de ce que le mur de soutènement serait commun et a fortiori, la propriété exclusive de M. X... ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi. »
Néanmoins, la jurisprudence confirme que la présomption de non-mitoyenneté (qui est une présomption simple) peut néanmoins être renversée à la condition de rapporter la preuve de sa mitoyenneté (Cour de cassation, Civ. 3, 22 octobre 2003, n° 02-13.699, FS-D) :
Par exemple :
- Si le mur présente des marques matérielle caractéristiques de mitoyenneté ;
- S’il est possible d’établir que le mur a été construit à frais partagés ;
- La présomption de propriété peut être combattue par un titre contraire ;
- Acquisition par prescription.
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