La gestion des charges de copropriété est une tâche essentielle pour le bon fonctionnement d’une copropriété. Cependant, il arrive que certains copropriétaires ne s’acquittent pas de leurs obligations financières, créant ainsi des difficultés pour le syndicat des copropriétaires. La récupération de ces charges impayées est donc cruciale pour maintenir l’équilibre financier de la copropriété.
Cet article explore les différentes étapes et procédures légales permettant au syndicat des copropriétaires de récupérer les charges impayées.
1. La mise en demeure
La première étape pour le syndicat des copropriétaires consiste à envoyer une mise en demeure au copropriétaire défaillant. Cette mise en demeure doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle rappelle au copropriétaire ses obligations et lui fixe un délai pour régulariser sa situation.
En effet, l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 rappelle le principe selon lequel les copropriétaires doivent participer aux charges de copropriété en ces termes :
"Les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité objective que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, dès lors que ces charges ne sont pas individualisées.
Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, générales et spéciales, et de verser au fonds de travaux mentionné à l'article 14-2-1 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5.
Le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges et indique les éléments pris en considération ainsi que la méthode de calcul ayant permis de fixer les quotes-parts de parties communes et la répartition des charges.
Lorsque le règlement de copropriété met à la seule charge de certains copropriétaires les dépenses d'entretien et de fonctionnement entraînées par certains services collectifs ou éléments d'équipements, il peut prévoir que ces copropriétaires prennent seuls part au vote sur les décisions qui concernent ces dépenses. Chacun d'eux dispose d'un nombre de voix proportionnel à sa participation auxdites dépenses."
Selon l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, les frais de mise en demeure sont imputables au seul copropriétaire concerné.
Dans cette mise en demeure, il est indispensable de viser l'article 19-2 de la loi précitée aux termes duquel :
"A défaut du versement à sa date d'exigibilité d'une provision due au titre de l'article 14-1, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application du même article 14-1 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.Le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, après avoir constaté, selon le cas, l'approbation par l'assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles.
Le présent article est applicable aux cotisations du fonds de travaux mentionné à l'article 14-2-1.
Lorsque la mesure d'exécution porte sur une créance à exécution successive du débiteur du copropriétaire défaillant, notamment une créance de loyer ou d'indemnité d'occupation, cette mesure se poursuit jusqu'à l'extinction de la créance du syndicat résultant de l'ordonnance.
Si l'assemblée générale vote pour autoriser le syndic à agir en justice pour obtenir la saisie en vue de la vente d'un lot d'un copropriétaire débiteur vis-à-vis du syndicat, la voix de ce copropriétaire n'est pas prise en compte dans le décompte de la majorité et ce copropriétaire ne peut recevoir mandat pour représenter un autre copropriétaire en application de l'article 22".
Cette étape étant une étape cruciale vous permettant de saisir le juge.
ce qu'il faut retenir, c'est qu'en cas de carence du syndic, l'article de la loi de 1965 permet à tout copropriétaire d'exercer une action en paiement des provisions sur charges dues. Cette disposition garantit que les intérêts financiers de la copropriété sont protégés, même en l'absence d'une action proactive du syndic.
2. L’inscription d’une hypothèque légale
Si la mise en demeure reste sans effet, le syndicat des copropriétaires peut procéder à l’inscription d’une hypothèque légale sur le lot du copropriétaire défaillant.
Cette hypothèque garantit le paiement des charges de copropriété.
L’article 19 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit cette possibilité sans qu’il soit nécessaire d’obtenir une autorisation préalable de l’assemblée générale :
"Les créances de toute nature du syndicat à l'encontre de chaque copropriétaire sont, qu'il s'agisse de provision ou de paiement définitif, garanties par une hypothèque légale sur son lot. L'hypothèque peut être inscrite soit après mise en demeure restée infructueuse d'avoir à payer une dette devenue exigible, soit dès que le copropriétaire invoque les dispositions de l'article 33 de la présente loi.
Le syndic a qualité, sans autorisation préalable de l'assemblée générale, pour faire inscrire cette hypothèque au profit du syndicat, en consentir la main levée et, en cas d'extinction de la dette, en requérir la radiation.
Le copropriétaire défaillant peut, même en cas d'instance au principal, sous condition d'une offre de paiement suffisante ou d'une garantie équivalente, demander mainlevée totale ou partielle au président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond.
Aucune inscription ou inscription complémentaire ne peut être requise pour des créances exigibles depuis plus de cinq ans.
Les créances visées à l'alinéa 1er bénéficient, en outre, du privilège prévu par l'article 2332 1° du code civil en faveur du bailleur. Ce privilège porte sur les meubles garnissant les lieux appartenant au copropriétaire ainsi que sur les sommes dues par le locataire à son bailleur."
3. La procédure judiciaire
En cas de non-paiement persistant, le syndicat des copropriétaires peut engager une procédure judiciaire.
Il s’agit de saisir le tribunal judiciaire pour obtenir une condamnation du copropriétaire défaillant au paiement des charges impayées selon une procédure appelée "procédure accélérée au fond".
Le tribunal peut également ordonner la vente du lot pour permettre le recouvrement des sommes dues.
Ce qu'il faut retenir, c'est qu'en fonction du montant des impayés, il faudra envisager la mise en œuvre d'une conciliation/médiation préalable si les sommes demandées sont inférieures à la somme globale de 5.000 euros.
3.1. La saisine du tribunal
La saisine du tribunal judiciaire doit être effectuée par le syndic, qui représente le syndicat des copropriétaires.
Le syndic doit fournir toutes les pièces justificatives prouvant la créance, telles que les procès-verbaux des assemblées générales approuvant les comptes, les appels de fonds, et les mises en demeure...
La jurisprudence confirme que le syndicat peut réclamer non seulement les charges impayées, mais aussi les frais nécessaires au recouvrement de ces charges. Par exemple, dans une affaire jugée par la Cour d'appel de Versailles, le syndicat des copropriétaires a été autorisé à réclamer les frais de mise en demeure et de relance, en plus des charges impayées (Cour d'appel de Versailles - 19/07458 4e Chambre 2e Section - 2022-05-09).
3.2. Le jugement
Le tribunal judiciaire, après avoir examiné les pièces et entendu les parties, rend un jugement. Si le copropriétaire est condamné, il doit s’acquitter des charges impayées ainsi que des frais de justice. Le jugement peut également prévoir des intérêts de retard et des dommages et intérêts pour résistance abusive ainsi que l'ensemble des frais de procédure (frais d'avocat et de commissaire de justice).
4. L'exécution forcée
Une fois la décision rendue, le syndicat des copropriétaires peut mettre en œuvre des voies d’exécution pour récupérer les sommes dues par l'intermédiaire d'un commissaire de justice.
Cela peut inclure la saisie des comptes bancaires, des salaires, ou encore la vente forcée du lot...
4.1. La saisie des comptes bancaires
La saisie des comptes bancaires est une procédure rapide et efficace pour récupérer les sommes dues. Elle permet de bloquer les fonds sur le compte du copropriétaire défaillant jusqu’à concurrence du montant de la créance.
Les commissaires de justice peuvent entreprendre d'autres démarches, qui ne seront pas développées ici.
4.2. La Vente forcée du lot
En dernier recours, le syndicat des copropriétaires peut demander la vente forcée du lot. Cette procédure, bien que lourde et coûteuse, permet de récupérer les charges impayées en vendant le bien immobilier du copropriétaire défaillant.
5. Les frais de recouvrement
Les frais de recouvrement, tels que les frais d’huissier, les frais de justice, et les frais de mise en demeure, sont imputables au copropriétaire défaillant. L’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que ces frais sont à la charge exclusive du copropriétaire concerné.
Par exemple, la Cour d'appel de Paris a confirmé que les frais de mise en demeure et les honoraires d'huissier engagés par le syndicat pour recouvrer une créance sont imputables au copropriétaire débiteur (Cour d'appel de Paris - 22/19920, Pôle 4 - Chambre 2 - 2024-05-28).
En tout état de cause, la Cour d'appel de Aix Provence a pu rappeler que les copropriétaires doivent régler leurs appels de fonds dès le premier jour du trimestre appelé, soulignant l'importance de respecter les obligations contractuelles de paiement des charges de copropriété (Cour d'appel de Aix Provence - 20/08484, Chambre 1-7 - 2024-04-03).
La récupération des charges impayées est une procédure complexe qui nécessite une bonne connaissance des dispositions légales et une gestion rigoureuse de la part du syndic.
Je ne peux que conseiller au syndic de prendre conseil auprès d'un Avocat spécialisé en droit immobilier pour se faire accompagner et assister dès le stade de la mise en demeure.
Pour rappel, les frais de procédure (avocat et commissaire de justice) seront mises à la charge du copropriétaire défaillant par le juge.
Le cabinet se tient à votre disposition dans la mesure où nous assistons de nombreux syndic dans le cadre de procédures de recouvrement.
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